L’Etat de Stress Post Traumatique ESPT ou PTSD est un trouble anxieux

Le PTSD, cet étrange oiseau dans la volière des troubles anxieux
Imaginez une volière où chaque trouble mental serait un oiseau au plumage distinct. Dans un coin, les troubles anxieux gazouillent de concert, leurs ailes vibrantes d’appréhension. Et puis, isolé sur une branche, se tient le PTSD – cet oiseau de proie aux yeux hantés, dont les cris répètent inlassablement le même récit de terreur. La récente tentative de l’OMS de lui tailler des ailes diagnostiques plus « pures » dans la CIM-11 a provoqué un remarquable paradoxe : plus on cherche à l’éloigner de ses voisins anxieux, plus il révèle sa nature profonde.
Le grand remue-ménage diagnostique
Entre la CIM-10 et la CIM-11, les experts ont joué aux architectes nosographiques avec un ambitieux projet : isoler le PTSD dans une catégorie immaculée, débarrassée des « impuretés » anxieuses et dépressives. Comme si l’on tentait d’extraire l’ambre d’un fossile sans briser ses fragiles inclusions. L’étude d’AC et al. (2019) révèle pourtant l’échec poignant de cette entreprise : les trois symptômes cardinaux du PTSD (reviviscences, évitement et hypervigilance) restent indissociablement liés à l’anxiété, tel un écho déformé mais reconnaissable.
« La dépression est un trouble anxieux qui a mal tourné » – cette formule-choc des Fous de Normandie résume l’impasse classificatoire. Comme si la psychiatrie tentait de découper l’océan en carrés étanches alors que les vagues se mélangent inévitablement.
Anatomie d’un spectre
Le PTSD se présente comme une matriochka clinique : sous sa couche apparente de souvenirs intrusifs se cache une strate d’hyperactivation neurovégétative, puis plus profondément, le noyau dur d’une anxiété existentielle. Les chercheurs décrivent ce phénomène en termes de « sentiment persistant de menace » – non pas une peur passagère, mais une restructuration durable de la perception du monde, comme si le sujet portait désormais des verres teintés en noir.
- Les reviviscences : Mémoire hantée où le passé refuse de devenir histoire
- L’évitement : Géographie personnelle redessinée par la peur
- L’hypervigilance : Système d’alarme coincé en position « danger permanent »
Le paradoxe thérapeutique
L’étude souligne un enseignement crucial : les TCC centrées sur le trauma obtiennent leurs meilleurs résultats lorsqu’elles acceptent cette dimension anxieuse plutôt qu’en la niant. Comme soigner un arbre sans ignorer ses racines. Pourtant, la tentation classificatoire persiste, héritage d’une psychiatrie encore marquée par le modèle médical traditionnel.
Les données révèlent une vérité clinique dérangeante : 80% des patients PTSD présentent des comorbidités anxieuses, chiffre qui résiste obstinément aux redéfinitions nosographiques. Ce qui pose une question radicale : et si ces « comorbidités » n’en étaient pas, mais représentaient plutôt les différentes facettes d’un même phénomène psychopathologique ?
Vers une psychiatrie des nuances
La leçon dépasse le cadre du PTSD. Elle interroge notre façon de cartographier l’esprit souffrant. Comme le suggère si poétiquement la chaîne des Fous de Normandie, peut-être faut-il envisager une approche dimensionnelle plutôt que catégorielle, acceptant que certains troubles sont autant des processus que des états.
Le PTSD nous enseigne que le trauma ne se contente pas d’envahir le présent – il colonise également notre façon d’appréhender l’avenir. Cette anxiété prospective, ce sentiment de vulnérabilité permanente, constitue peut-être le pont invisible qui relie indéfectiblement le PTSD au vaste continent des troubles anxieux. Un pont que toutes les révisions nosographiques du monde ne pourront jamais vraiment détruire.
En définitive, le PTSD ressemble à ces villes reconstruites après une guerre : les blessures visibles ont peut-être cicatrisé, mais l’architecture intime de l’être en reste à jamais transformée. Et c’est dans la reconnaissance de cette transformation globale – pas seulement cognitive, mais aussi émotionnelle et existentielle – que réside peut-être la clé d’une compréhension plus humaine de ce trouble complexe.
Référence scientifique
AC, B., WF, V., TA, D., E, G., SR, L., YJ, M., M, O., M, O., W, Q., A, R., U, S., S, S., RC, K., KC, K., & AY, S. (2019). Differentiating PTSD from anxiety and depression: Lessons from the ICD-11 PTSD diagnostic criteria. *Depression and Anxiety*, *36*(6), 490–498. https://doi.org/10.1002/da.22881