L’électrorétinogramme pour différentier une schizophrénie d’un trouble bipolaire ? Sérieux? Oui!

L’œil, fenêtre inattendue sur l’esprit : quand l’électrorétinogramme éclaire la psychiatrie
Imaginez un instant que le secret des troubles psychiatriques se cache… au fond de nos yeux. C’est le pari audacieux d’une étude récente qui a transformé la rétine en une sorte de cristal ball scientifique. L’électrorétinogramme (ERG), cet examen ophtalmologique méconnu, pourrait-il vraiment distinguer la schizophrénie du trouble bipolaire ? La réponse, aussi surprenante soit-elle, semble pencher vers un « oui » retentissant.
La rétine : ce morceau de cerveau qui nous regarde
L’œil n’est pas simplement un objectif biologique – c’est une extension du cerveau à ciel ouvert. Comme l’explique si poétiquement la vidéo des Fous de Normandie, la rétine est « un morceau de cerveau » peuplé de neurones spécialisés dans la traduction lumineuse. Chaque photon capté déclenche une symphonie électrique que l’ERG sait capter avec une précision d’horloger suisse.
« Ce qui vous permet de voir cette vidéo […] ça aboutit sur votre rétine. La rétine, elle est constituée de neurones […] C’est un morceau de cerveau, finalement. »
Cette proximité neuronale fait de l’œil un témoin privilégié des tempêtes cérébrales. Les chercheurs ont donc eu cette intuition géniale : et si les perturbations observables dans la rétine reflétaient celles, plus insaisissables, de l’esprit ?
Schizophrénie vs bipolaire : le casse-tête diagnostique
Distinguer ces deux pathologies relève souvent de l’art subtil du psychiatre. Comme deux jumeaux psychotiques, elles partagent des symptômes communs – hallucinations et délires notamment – tout en développant des signatures propres. La schizophrénie s’accompagne typiquement d’une désorganisation persistante, tandis que le trouble bipolaire alterne entre obscurité dépressive et feu d’artifice maniaque.
Pourtant, certaines formes frontières brouillent les cartes. Les troubles schizoaffectifs, ces hybrides cliniques, rendent parfois le diagnostic aussi incertain qu’un diagnostic météo à quinze jours. C’est dans ce brouillard nosologique que l’ERG pourrait apporter une lumière nouvelle.
L’étude qui a fait trembler les frontières diagnostiques
L’expérience menée est d’une élégante simplicité : 150 schizophrènes, 150 bipolaires et 200 témoins soumis à un ERG méticuleux. Les résultats ? Une différence marquée dans les courbes électriques rétiniennes, particulièrement dans l’amplitude des ondes. Les patients schizophrènes présentent des réponses atténuées, comme si leurs neurones rétiniens chuchotaient là où ceux des bipolaires parlaient distinctement.
Une précision à faire pâlir les tests conventionnels
Avec 91% de précision discriminante, ces mesures objectives surpassent bien des échelles d’évaluation subjectives. Imaginez : un simple examen oculaire capable de trancher des cas complexes où même les cliniciens chevronnés hésitent. La promesse est vertigineuse.
- Ondes réduites : signature possible d’un déficit dopaminergique spécifique
- Latences modifiées : reflet d’un traitement de l’information altéré
- Motifs distinctifs : comme un QR code neuronal différenciant les pathologies
Révolution ou mirage optique ? Les limites à considérer
Avant de voir fleurir des ERG dans tous les CMP, quelques ombres au tableau méritent attention. Les traitements médicamenteux, bien que contrôlés dans l’étude, pourraient influencer les résultats. Et si ces anomalies rétiniennes n’étaient que le reflet secondaire de processus plus globaux ?
Reste que cette piste ouvre une voie royale vers une psychiatrie plus objective. Comme Galilée braquant sa lunette vers le ciel, les chercheurs ont peut-être trouvé dans l’œil ce télescope capable de cartographier les confins de l’esprit malade.
Conclusion : Vers une psychiatrie à l’œil clinique
Cette étude ne propose rien de moins qu’un changement de paradigme. En transformant l’œil en fenêtre diagnostique, elle rappelle que les plus grandes révolutions scientifiques naissent parfois en regardant là où personne ne songeait à chercher. L’ERG psychiatrique n’en est qu’à ses balbutiements, mais son potentiel éclaire déjà d’une lumière nouvelle les zones d’ombre de nos classifications.
Qui aurait cru qu’un jour, différencier la schizophrénie du trouble bipolaire pourrait commencer par un simple « ouvrez grand les yeux » ? La science, décidément, a toujours plus d’un tour dans son sac – ou devrait-on dire, dans sa rétine.
Référence scientifique
Hébert, M., Mérette, C., Gagné, A. M., Paccalet, T., Maziade, M., & Lavoie, J. (2020). The electroretinogram may differentiate schizophrenia from bipolar disorder. *Biological Psychiatry, 87*(5), 411-418. https://doi.org/10.1016/j.biopsych.2019.06.014