Le risque d’AVC liés aux traitements du trouble bipolaire


Le risque d’AVC liés aux traitements du trouble bipolaire

Illustration pour Le risque d’AVC liés aux traitements du trouble bipolaire

Lithium et valproate : la balance subtile entre humeur et vaisseaux sanguins

Le trouble bipolaire est une danse capricieuse entre ciel et abîme, où les médicaments servent de balancier. Mais certains stabilisateurs d’humeur pourraient-ils, dans l’ombre, déséquilibrer une autre mécanique corporelle ? Une étude publiée dans le British Journal of Psychiatry jette une lumière crue sur ce paradoxe thérapeutique : si le lithium garde sa couronne de traitement roi, d’autres molécules comme le valproate semblent alourdir dangereusement la balance risque-bénéfice.

L’AVC, cet intrus silencieux

Imaginez un fleuve sanguin qui soudain déborde ou s’assèche dans les méandres du cerveau. L’accident vasculaire cérébral (AVC) frappe comme un voleur, emportant parfois des fonctions vitales en quelques minutes. Pour les 19 433 patients bipolaires suivis dans l’étude, ce risque – bien que faible – devient un paramètre crucial dans le choix du traitement.

« Prendre du lithium, c’est comme naviguer avec une boussole fiable ; le valproate, lui, ajoute des courants imprévisibles »

Les chiffres parlent d’eux-mêmes :

  • Lithium & lamotrigine : pas d’augmentation significative du risque
  • Valproate : +76% de risque d’AVC
  • Carbamazépine : +81% de risque

Une étude qui bouscule les certitudes

Méthodologie : traquer l’invisible

L’équipe de chercheurs a mené l’enquête comme des détectives médicaux, scrutant les dossiers de patients bipolaires sur plusieurs années. Leur approche a consisté à :

  • Comparer les groupes sous différents traitements
  • Corriger les biais (âge, antécédents cardiovasculaires, autres médicaments)
  • Isoler l’effet spécifique des stabilisateurs d’humeur

Résultats : une alerte en deux temps

Sur les 609 AVC recensés, un motif inquiétant émerge : la majorité survient chez des patients sous valproate ou carbamazépine. Pourtant, ces médicaments restent largement prescrits – parfois en première intention – pour leurs effets rapides sur les phases maniaques.

Le lithium, ce mal-aimé qui protège

Ironie du sort : le lithium, souvent critiqué pour ses effets secondaires (tremblements, soif, surveillance biologique), se révèle ici comme un gardien des artères. Son mécanisme d’action, encore mystérieux à bien des égards, semble épargner le système vasculaire tout en stabilisant l’humeur.

Les chercheurs émettent plusieurs hypothèses pour expliquer cette différence :

  • Le valproate pourrait altérer la coagulation sanguine
  • Certains stabilisateurs aggraveraient les facteurs métaboliques (prise de poids, diabète)
  • Le lithium possèderait des propriétés neuroprotectrices indirectes

Vers une prescription éclairée

Ces résultats ne signent pas l’arrêt de mort du valproate, mais appellent à une médecine plus nuancée. Comme un horloger ajustant des rouages délicats, le psychiatre doit désormais :

  • Privilégier le lithium pour les patients à risque vasculaire
  • Renforcer la surveillance sous valproate (tension, bilan lipidique)
  • Éduquer les patients sur les signes avant-coureurs d’AVC

Pour les personnes bipolaires, ces données offrent une arme précieuse : la connaissance. Comprendre ces risques, c’est pouvoir dialoguer avec son médecin pour trouver le traitement qui stabilisera l’humeur sans mettre en péril les vaisseaux sanguins.

Conclusion : une alerte, pas une condamnation

Cette étude agit comme un phare dans la brume thérapeutique du trouble bipolaire. Elle rappelle que chaque molécule porte sa propre constellation d’effets – visibles et invisibles. Le valproate reste un outil précieux, mais désormais, nous savons qu’il faut l’utiliser en pleine conscience de son ombre portée sur les artères.

Quant au lithium, ce vieux compagnon des bipolaires, il confirme sa place de traitement pivot – non pas parce qu’il serait parfait, mais parce que ses bénéfices, à la lumière de ces nouveaux éléments, brillent plus que jamais.

Référence scientifique

Chen, P.-H., Tsai, S.-Y., Pan, C.-H., Chan, C.-K., Su, S.-S., Chen, C.-C., & Kuo, C.-J. (2019). Mood stabilisers and risk of stroke in bipolar disorder. *The British Journal of Psychiatry, 214*(5), 265–273. https://doi.org/10.1192/bjp.2018.203

Jean-Baptiste ALEXANIAN

Alexanian, J.-B. (2025). Le risque d’AVC liés aux traitements du trouble bipolaire. [Article de blog]. URL: https://www.youtube.com/watch?v=TLLilAFlAag

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *