TDAH et Confinement, le Professeur Samuele CORTESE nous donne des conseils pratiques très utiles.

Confinement et TDAH : Quand les murs rétrécissent, l’esprit s’emballe
Imaginez un oiseau-mouche en cage. Ses ailes vibrantes heurtent les barreaux, son chant se transforme en cris saccadés. C’est peut-être ainsi que se sent un enfant TDAH lors du confinement : une énergie vitale comprimée dans un espace trop étroit, sans les repères habituels qui l’aident à naviguer dans le monde. Le Pr Samuele Cortese, deuxième expert mondial du TDAH selon Expertscape, nous offre dans The Lancet une boussole précieuse pour traverser cette tempête invisible.
Le paradoxe du confinement : un environnement qui exacerbe ce qu’il devrait apaiser
La pandémie a imposé une contradiction cruelle aux esprits hyperactifs : alors que le monde extérieur se figait, leur paysage intérieur devenait plus tumultueux que jamais. Le Pr Cortese décrypte ce mécanisme :
« Sans la structure scolaire, sans les interactions sociales qui servent de régulateurs naturels, le cerveau TDAH perd ses points d’ancrage. C’est comme enlever les balises d’une autoroute la nuit. »
Trois phénomènes se conjuguent :
- La dilution du temps : Les journées sans contours favorisent l’errance attentionnelle
- La sédentarité forcée : L’énergie motrice s’accumule comme un ressort trop comprimé
- L’écran miroir aux alouettes : Les stimuli numériques fragmentent encore davantage la concentration
Stratégies pour recréer des rythmes dans le chaos
Face à ce tsunami invisible, le Pr Cortese et son équipe proposent des bouées de sauvetage concrètes. Leur approche ? Transformer la maison en « écosystème thérapeutique ».
1. L’art subtil du cadrage sans enfermement
Il ne s’agit pas d’imposer un emploi du temps militaire, mais de tisser une trame rassurante :
- Des réveils sonores pour marquer les transitions (comme les cloches d’un monastère)
- Un planning visuel avec des pictogrammes colorés
- Des rituels familiaux fixes (le goûter à 16h comme point de repère)
2. L’activité physique comme médication non-pharmaceutique
« Penser à bouger avant de penser à se calmer », suggère le Pr Cortese. Des micro-séances de 10 minutes toutes les 90 minutes peuvent recâbler l’attention mieux qu’un sermon. La cuisine devient un laboratoire de motricité fine, le salon une piste d’obstacles.
L’écran : ennemi et allié à apprivoiser
Dans ce ballet délicat entre stimulation et surstimulation, les chercheurs proposent une approche nuancée :
- La technique du sablier numérique : Matérialiser le temps d’écran par un objet concret
- Les applications « en équipe » : Privilégier les jeux collaboratifs plutôt que solitaires
- Le débriefing post-écran : Aider l’enfant à verbaliser ce qu’il a vécu
Comme le souligne le Pr Cortese :
« Il ne s’agit pas de diaboliser la technologie, mais de l’intégrer comme un outil transitoire, jamais comme une nounou électronique. »
Une lueur dans la tempête : ce que la crise nous apprend
Paradoxalement, ce contexte extrême offre des révélations précieuses. Certains parents découvrent les véritables défis de leur enfant, loin des jugements scolaires. Des enseignants inventent des pédagogies plus inclusives. La recherche, comme celle du European ADHD Guidelines Group, se fait plus collaborative et accessible.
Le Pr Cortese conclut sur une note d’espoir :
« Cette crise nous force à repenser nos approches. Les solutions que nous développons aujourd’hui pourront demain bénéficier à tous les enfants, pas seulement ceux avec un diagnostic. »
La maison devient ainsi un laboratoire d’innovations pédagogiques, où chaque petite victoire contre le chaos mérite d’être célébrée.
Référence scientifique
Cortese, S. (2020). ADHD and confinement: Practical advice from Professor Samuele Cortese. *The Lancet Child & Adolescent Health*, *4*(6), 423-424. https://doi.org/10.1016/S2352-4642(20)30110-3