Dormir dans la même chambre que son enfant, dangereux?


Dormir dans la même chambre que son enfant, dangereux?

Illustration pour Dormir dans la même chambre que son enfant, dangereux?

Dormir avec son enfant : crime contre l’autonomie ou étreinte vitale ?

Il y a quelque chose de profondément troublant à devoir prouver scientifiquement que la présence rassurante d’un parent ne nuit pas à son enfant. Comme si trois cent mille ans d’évolution nous avaient soudain oubliés, laissant place à un doute absurde : et si répondre à l’instinct le plus primal – protéger sa progéniture – s’avérait finalement nocif ?

« Nous sommes la première espèce dans l’histoire du vivant à s’interroger sur la légitimité de son propre instinct maternel. »

Le berceau et le laboratoire : une étrange confrontation

L’étude de Beijers et ses collègues (2019) jette une ombre statistique sur cette pratique ancestrale. Leurs chiffres suggèrent que les enfants ayant partagé la chambre parentale au-delà de six mois présenteraient davantage de troubles anxieux ou comportementaux vers 6-8 ans. La science, comme un miroir déformant, nous renvoie l’image paradoxale d’une proximité qui étoufferait là où elle devrait rassurer.

Pourtant, ces données ressemblent étrangement à ces photographies de galaxies lointaines : elles capturent une réalité, certes, mais hors de son contexte cosmique. Car comment quantifier l’odeur rassurante d’un parent endormi ? Comment mesurer la sécurité intérieure que procure le souffle régulier d’une mère à quelques pas de son nourrisson ?

L’autonomie, cette idole moderne

Le paradoxe du petit mammifère

Nous exigeons de nos nouveau-nés ce que nous n’imposerions à aucun autre mammifère : l’indépendance précoce. Un lionceau blotti contre sa mère jusqu’à six mois passe pour naturel, un bébé humain dans le même cas devient suspect. Cette injonction à l’autonomie précoce ressemble à ces arbres qu’on force à pousser droit – ils grandissent effectivement, mais au prix de blessures invisibles.

L’étude qui questionne sans condamner

L’équipe de Beijers elle-même nuance ses conclusions : les troubles observés pourraient tout autant provenir du stress parental que de la pratique du cododo. Comme si nous avions mal posé l’équation, confondant corrélation et causalité. Le véritable poison ne serait-il pas notre anxiété de bien faire, cette culpabilité qui transforme chaque choix parental en potentielle erreur irréversible ?

Retrouver la boussole de l’instinct

Peut-être faut-il lire cette étude non comme une condamnation du sommeil partagé, mais comme un plaidoyer pour une parentalité attentive et ajustée. Les chiffres murmurent une vérité plus subtile : ce n’est pas la proximité physique qui pose problème, mais son caractère rigide et anxiogène.

  • L’odeur parentale comme premier territoire de sécurité
  • Le souffle synchronisé comme première leçon de régulation émotionnelle
  • La présence discrète comme premier rempart contre l’angoisse de séparation

Ces besoins fondamentaux ne s’éteignent pas magiquement à six mois, pas plus qu’ils ne justifient une fusion permanente. La sagesse résiderait peut-être dans cet entre-deux que connaissent intuitivement tant de cultures : proximité sans étouffement, autonomie sans abandon.

Conclusion : dépasser la guerre des chambres

La question n’est peut-être pas de savoir s’il faut dormir avec son enfant, mais comment être présent à son sommeil. Comme ces marées qui savent quand caresser le rivage et quand se retirer, la parentalité trouve son rythme lorsqu’elle cesse de s’interroger sur sa légitimité.

Les études viendront et partiront, les modes pédagogiques fluctueront. Mais sous les chiffres et les théories, battra toujours ce cœur simple et têtu : celui d’un parent qui écoute son enfant, et celui d’un enfant qui a besoin de savoir son parent proche. Pas contre nature, mais selon sa nature profonde.

« Le premier berceau de l’humanité fut la chaleur d’un corps contre un autre corps. Nul protocole scientifique ne pourra jamais invalider cette vérité-là. »

Référence scientifique

Beijers, R., Cassidy, J., Lustermans, H., & Weerth, C. (2019). Parent–infant room sharing during the first months of life: Longitudinal links with behavior during middle childhood. *Child Development*, *90*(4), 1352–1368. https://doi.org/10.1111/cdev.13146

Jean-Baptiste ALEXANIAN

Alexanian, J.-B. (2025). Dormir dans la même chambre que son enfant, dangereux?. [Article de blog]. URL: https://www.youtube.com/watch?v=3-qXPZpe2PU

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